La Tangia de Marrakech

par Samia Bouchenafa
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pots a tangia

La recette de la Tangia de Marrakech ou Tanjia Marrakchia, un concentré de saveur. Voilà un plat des plus emblématique de la ville Marrakech, la fameuse tangia Marocaine, une viande moelleuse et goûteuse, parfumées d’épices cuite longuement et à basse température. Un véritable concentré de saveur qui explose en bouche.

La véritable Tangia de Marrakech

Bonjour à vous qui visitez mon blog de recettes de cuisine et de pâtisserie.

Ah Marrakech, la ville rouge, connue mondialement et ville touristique parmi les plus prisée au monde, et il faut y aller pour comprendre. J’y ai vécu et y retourne au moins 4 fois par an, et je pleure chaque fois que j’en part, un déchirement. Ma belle famille Marrakchie de souche, m’a fait découvrir véritablement la tangia de Marrakech, la vraie, il faut dire que la maison familiale se trouve en plein dans la Médina, près de la célèbre place Djamaa el Fna, à côté de la mosquée Ben Youssef, et à quelques dizaines de mètres du hammam, et je m’interrogeais pourquoi chaque fois que je passais devant le hammam, ça sentait super bon, alors qu ‘en temps normal quand on passe devant un hammam on sent plus les odeurs de savon noir et l’humidité du bain maure.

 

Et mon Mari, m’emmena carrément voir le feu du hammam, j’étais étonnée que l’on chauffe encore le hammam au feu de bois, il faut dire que dans la Médina de Marrakech il n’y a pas le gaz de ville, car ce sont de toutes petites ruelles ou impasses, et il est très difficiles de faire les travaux pour y placer le gaz et y faire entrer les camions voire impossible, donc les habitants préparent leur repas avec du gaz en bouteille, et comme il fait chaud quasiment toute l’année, pratiquement pas besoin de chauffage, seulement la climatisation réversible et ça suffit.

rue-de-marrakech

Et en me rendant dans les entrailles du hammam, il faut être agile pour descendre car c’est creusé assez en profondeur sous le hammam, se trouvait un homme qu’on appelle  » Moul fermatchi  » celui qui est le gardien du feu, il entretient le feu pour que le hammam soit toujours chaud. 

four a tangia

Et là je vis plein de jarres en terre cuite, qui ressemblent à des amphores, toutes fermées avec du papier kraft et percées  ou du papier aluminium, resserrées sur le col avec  du fil de fer, et oh my god, qu ‘est ce que ça sentait bon ! Pas de signes distinctif sur les jarres, le fernatchi savait exactement à qui elles appartenaient, et il mettait ces jattes à cuire dans les braises, qui étaient constituées de la sciure de bois qu ‘ils récupérait des menuisiers.

entree du four a tangia

La particularité de ce plat typiquement Marrackchi bien qu’on le retrouve aussi dans d’autres villes comme à Fes ou à Meknes, car ce sont des villes ou l’artisanat y est aussi extrêmement développés, je ne connais pas les recettes des autres car je sais qu’il en existe 4 ou 5, mais est aussi un plat que l’on retrouve dans le sud saharien Algérien et Tunisien, ce qui est un peu normal car il a voyagé avec ces populations nomades Touaregs, sauf que ne disposant pas de hammam ils le faisaient cuire sur du charbon de bois, il s’appelle l’ham el kolla mais ussi el ghamoussa.

Vous pouvez voir sur la vidéo ci-dessous comment se cuit la tangia, juste devant les portes semi-ouvertes du four, je peux vous dire qu’il fait très chaud dedans, j’ai cru que j’allais cuire avec la tangia.

La tangia est un plat métonymique, tout comme le tagine  qui est à la fois le contenant et le contenu, c’est une amphore en terre cuite dont l’intérieur est vernissé ou pas mais qui est culotté avant toute utilisation pour éviter qu’il ne se casse sous l’effet de la chaleur.

tangia de marrakech

La tangia est donc aussi le plat dans laquelle on y fait cuire longtemps (très longtemps) de la viande, en général on y met du jarret d’agneau ou de veau, certains y ajoutent aussi des pieds de veau (mon mari le fait, moi j’en ai une sainte horreur), et de la queue ou de la joue. Je n’aime pas trop ces viandes assez gélatineuses, donc il ne me mettait que des morceaux sans pour moi. On y ajoute du smen (beurre clarifié) et un mélange d’épices, on ferme le tout avec un papier kraft huilé et hop c’est parti pour au moins 6 heures de cuisson. Chapeau bas, ils connaissaient la cuisson basse température et à l’étouffée bien avant nous.

Le Moul  fermatchi sait exactement quand la tangia est cuite, juste à l’odeur qui s’en échappe. C ‘est un plat qui n’est fabriqué que par les hommes, et j’ai demandé à mon mari pourquoi cette discrimination, il m’a expliqué que c’était une tradition, je lui ai demandé son histoire et la voilà :

Marrakech depuis bien longtemps est connue pour son artisanat, pas seulement depuis quelques décennies, mais depuis des siècles, les  » Maalems ou M3alems  » (maîtres qui détenaient le savoir) artisans ont toujours perpétré et valorisés le savoir-faire artisanal, que ce soit dans l’art des zelliges (petit morceaux de faïences vernissées et disposées en motifs), l’art du geps (travail du plâtre dans le semi-frais) et qui décore merveilleusement bien les demeures et riads, l’art de la ferronnerie, de la dinanderie, du zouak (peinture sur bois qui ornent les plafond ou les pourtours de fenêtres) etc…

Tous ces artisans d’art, durant la semaine, rentraient déjeuner chez eux le midi, mais le vendredi, jour de prière, c’est sacré, ils n’avaient pas le temps donc devaient pouvoir se restaurer après et ne pouvant pas cuisiner sur place. Ils eurent l’idée de confectionner ces pots de terres cuites et d’y préparer ainsi la viande qu’ils mettaient à cuire très tôt le matin, et dans le four du hammam car ce four ne s’éteint jamais, sinon il mettrait trop de temps à chauffer le hammam.

maalem de marrakech

Lorsqu’ils revenaient de la prière, ils récupéraient la tangia et la dégustait avec leurs ouvriers avec du pain préparé par leurs épouses ou leur mère, toute leur équipe était réunie autour de ce plat, et c’est resté dans la tradition que les hommes fabriquent la tangia. À l’origine la Tangia n’était faite qu’à Marrakech, puis dans beaucoup de villes spécialisées dans l’artisanat elle se développa, avec quelque différences sur la composition des épices.

J’ai pu retrouver des écrits sur la tangia dans le livre anonyme d’El Andalous, que l’on appelait cuisson au « tannûr » pour désigner les plats cuits dans le four à bois, et le plat se nommait aussi soit les jarres ou gargoulettes, réalisé soit avec de l’agneau, de la brebis, du mouton ou du bélier, mais pas de veau, au même titre que la mourouzya dont je vous donnerais aussi la recette plus tard, plat médiéval lui aussi.

On retrouve ce plat aussi dans le sud Algérien, à Tindouf, adrar, Timimoun, ce qui n’a rien d’étonnant à cause des populations nomades berbères, sauf qu’il porte aussi le nom du plat qui ne s’appelle pas la tangia  mais je vais recherché son nom car j’ai peur de mal l’écrire , mais les populations du désert n’ayant pas de four à hammam, le faisaient cuire au feu de bois.

tangia Marrakchia

Voici 2 extraits du livre qui se rapproche le plus de la tangia, mais la seconde est la plus approchante, je n’ai rien changé.

Recette n°1 – du fartûn

Prendre le moule nommé fartûn, en forme de grande coupe, large d’embouchure et à fond étroit puis le mettre avec de l’huile à chauffer à feu doux. Lorsqu’elle bout, battre des œufs dans un plat avec du vinaigre et du safran, ce qu’il faut de cannelle, ajouter quelques amandes confites au vinaigre, verser le tout dans le fartûn et, lorsque cela prend consistance, passer la lame d’un couteau entre le fartûn et la viande et les œufs pour les décoller. Faire tomber de l’huile goutte à goutte dans la trace du couteau pour détacher du moule. Procéder avec grand soin pour conserver la forme dans son intégrité puis renverser tel quel dans un plat. Ce mets a véritablement l’aspect d’une tête de Maymûn[2].

(Pour le fartûn, voir Dozy, t. II, p. 256b. (il renvoie à šašiyya ; Supp., t.I, 802b. (šašiyya). Il donne une recette et cite (p. 803a.) un mets semblable nommé mušawwaš. Cf. infra -241- « šašiyya d’’Ibn Wâdi ». Ces mets se caractérisent par leur consistance ferme ; la présentation de la recette -241- de ce Traité est soignée).

Maymûn = singe mais plus vraisemblablement un nom propre, Cf. -337- et -339- deux recettes de « Tête de maymûn » et in -337- l’auteur précise ‘en forme de tête humaine’.

Une autre recette tirée du livre –  au N° 122 – Recette d’un plat connu sous le nom de « l’étouffé »

« Prendre de l’épaule de mouton, du collet ou de l’échine. Si c’est de l’épaule ou de l’échine, ne pas couper les morceaux trop petits, les laver et  les mettre dans une marmite avec une cuillère de bon murrî, deux cuillères d’huile douce et d’épices, nard de cannelle en branche. Couper cinq oignons, mettez-les dans la marmite avec un tout petit peu de sel, un petit peu d’eau et faites cuire. Lorsque c’est cuit à point, ajoutez du poivre et du safran. Si on l’envoie cuire au four sans le faire cuire entre deux feux ce sera bon mais, si on le fait cuire entre deux feux, recouvrir du papier huilé quand il est à point que vous placerez sur haut sur le fartûn, placer sur le couvercle de la marmite des tessons pleins de braises incandescentes pour faire dorer ce qui est à l’intérieur. Lorsque ce qui vient d’être expliqué est terminé, verser dans un plat, saupoudrer les meilleures épices et consommer, si Dieu le veut ».

Je vous livre la recette qui se fait à Marrakech telle que les marrakchis la font, évidemment nous n’avons pas de four à hammam, donc vous pouvez faire cuire la tangia dans le pot et au four, ou si vous avez un kanoun, support en terre cuite dans lequel on met du charbon de bois, vous pourrez le cuire à la braise ou le faire cuire à l’étouffée dans un plat en terre cuite c’est meilleur, maintenant pour accélérer le temps de cuisson on prépare d’abord la viande que l’on fait cuire dans un autocuiseur ou une marmite et après on le met dans la tangia, on gagne plusieurs heures et le goût est délicieux, je m’excuse pour la qualité des photos du plat que j’ai pris la nuit sans éclairage adéquat.

Par contre dans la tangia ils mettent très peu d’eau, la valeur d’un verre pour 4 morceaux,  la viande va lâcher son eau, et son gras et cuire dedans, le principal étant la cuisson à l’étouffée.

Si vous avez l’occasion de vous rendre à Marrakech, vous pourrez déguster de la tangia dans le souk de la médina ou sur la place Djamaa el Fna, le soir il y a plein de petites gargotes sur la place qui en proposent, elles sont délicieuses, n’oubliez pas de demander avec quelle sorte de viande elles sont préparées.

Les Marrakchis mettent des écorces de cannelles comme celles sur la photo ci-dessous

écorces ce cannelle

Je rappelle que les photos sont les miennes et ne sont pas libres de droits ainsi que les textes et vidéos sur le blog.

Tangia d’agneau pour 4 personnes.

800 gr de jarret d’agneau

4 gousses d’ail

2 citron confit au sel

1 oignon

2 cuillères à café de cumin

quelques pistils de safran

1/2 noix de muscade râpée

1 bâton de cannelle

3 cuillères à soupe d’huile d’olive

1/2 c. à café de raz el hanout

1 c. à café de gingembre en poudre

1 c. à café de curcuma

Methode/ 

Mariner les jarrets dans l’huile et les épices et le citron confit pendant 1 heure et laisser mariner.

tangia au mouton de marrakech

Puis démarrer la cuisson dans une marmite a fond épais, en ajoutant un peu d’eau (mais très peu, ne vous fiez pas à la photo c’est parce qu’on en avait fait pour 20 personnes, donc toute la viande est en dessous.

Mettre à cuire 30 minutes à partir de l’ébullition.

Retirer et mettre au four dans un plat en terre  avec un papier cuisson et que vous fermerez hermétiquement avec une ficelle à rôti du papier cuisson ou un papier aluminium  et faites un petit trou au milieu pour laisser s’échapper la vapeur.

Laisser cuire lentement à 100°C pendant 3 heures au moins.

tangia de marrakech véritable

Servir bien chaud, vous pouvez ajouter quelques amandes torréfiées sur le dessus mais c’est facultatif.

Accompagner d’un plat de semoule ou de riz ou de pommes de terre, avec un bon pain maison.

tangia à marrakech

pots a tangia

La Tangia de Marrakech

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Nombre de part: 4 Temps Préparation: Temps de Cuisson:
Nutrition facts: 380 calories 20 grams fat
Rating: 4.3/5
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Ingredients

  • 800 gr de jarret d'agneau
  • 4 gousses d'ail
  • 1 oignon
  • 2 citron confit au sel
  • 2 cuillères à café de cumin
  • quelques pistils de safran
  • 1/2 noix de muscade râpée
  • 1 bâton de cannelle
  • 3 cuillères à soupe d'huile d'olive
  • 1/2 c. à café de raz el hanout
  • 1 c. à café de gingembre en poudre
  • 1 c. à café de curcuma

Instructions

Mariner les jarrets dans l’huile et les épices et 1 citron confit coupé en tout petits morceaux pendant 1 heure et laisser mariner en malaxant bien pour imprégner la viande des épices.

Puis démarrer la cuisson dans une marmite a fond épais, en ajoutant un peu d'eau (mais très peu

Puis démarrer la cuisson dans une marmite a fond épais, en ajoutant un peu d'eau (mais très peu, ne vous fiez pas à la photo c'est parce qu’on en avait fait pour 20 personnes.

Mettre à cuire 30 minutes à partir de l'ébullition.

Retirer et mettre au four dans un plat en terre  avec un papier cuisson et que vous fermerez hermétiquement avec une ficelle à rôti du papier cuisson ou un papier aluminium  et faites un petit trou au milieu pour laisser s'échapper la vapeur.

Laisser cuire lentement à 100°C pendant 3 heures au moins.

Servir bien chaud, vous pouvez ajouter quelques amandes torréfiées sur le dessus mais c'est facultatif.

Accompagner d’un plat de semoule ou de riz ou de pommes de terre, avec un bon pain maison.

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