Le mfechech fi ahdjeur mo
Voilà un plat séculaire typiquement Algérois, que peu de personnes connaissent car malheureusement la transmission ne se fait quasiment plus pour les vieux plats, et pourtant il fait parti des fleurons de la gastronomie culinaire Algérienne et plus particulièrement Algéroise, des cigares de viande hachée mais que l’on se sert pas en entrée et qui est un plat à part entière accompagné de viande de mouton.
Ce plat porte un nom qui, si je le traduit de façon littérale signifie le petit chouchou (en parlant d’un petit garçon) sur les genoux de sa maman ou le petit dans le giron de sa mère, c’est difficile à traduire car il y a des expressions difficilement traduisibles ( mais à une signification, en vérité ce plat était destiné aux parents de la mariée invités le lendemain des noces, il montre aux beaux parents que ce garçon était gâtés chez ses parents donc il doit être gâtés chez ses beaux parents et par son épouse). Ce plat n’était confectionnés que dans les vieilles familles Algéroises, et je me souviens encore de ma mère ou de mes tantes qui le confectionnait car ce plat n’était jamais préparé par d’autres personnes que celle qui recevait. Nous ne servions que de commis et encore, pour rouler les cigares ou les faire frire, mais par contre nos mamans et grands-mères nous l’ont transmise. (Au passage je remercie Zakia ma cousine qui m’a aidé pour la traduction, et en même temps nous nous sommes rappelés tous ces beaux moments, pleins de nostalgie).
Dans certaines familles il s’appelle aussi momo (ou moumou qui veut dire le petit garçon) fi hdjer mou (même signification que plus haut – sur les genoux de sa maman). Nous avons beaucoup de plat qui portent des noms bizarres comme ” bessou la t’messou (embrasse le sans le toucher) ras el hanout que vous connaissez sûrement comme épices (tête du magasin) bref il y en a encore plein mais je ne vais pas tous les citer ici.
Malheureusement certaines traditions se perdent et maintenant ce nom de mfechech est attribué à un gâteau apparu récemment qui est un gâteau sans cuisson et qui n’a rien à voir avec ce plat, car il s’agit bien d’un plat composé uniquement de viandes, et non d’un gâteau comme samsa avec des amandes et de la fleur d’oranger trempées dans le miel, ou d’une entrée comme le bourek ou beurek ou briouates, qui eux aussi sont des cigares de feuilles de briks ou feuilles de diouls viandes hachées de boeuf, ou de poulet, ou de fruits de mer, qui sont passent par un bain de friture et que l’on sert surtout quand nous avons des invités ou pendant le mois de Ramadan.
Le mfechech ne doit pas être confondu avec un autre plat qui s’appelle Mghellef fi ghlâfou qui sont des boureks (petits cigares de feuille de brick farcis de viande hachée et avec des oeufs battus en omelette) et servit avec de la viande en sauce blanche que l’on retrouve dans le livre de Fatima Zohra Bouayed ” le livre de la cuisine d’Algérie”page 72, ni avec comme j’ai pu le voir, car là il s’agit là encore d’un autre plat qui s’appelle Ãïnine spaniolia (les yeux de l’Espagnole qui est une boule de viande hachée farcie avec un oeuf dur, et que l’on sert seulement quand la femme a accouché, qui se trouve dans la région Bônoise et en Tunisie).
Le mfechech quant à lui n’est pas une entrée, il est le plat, c’est un cigare de viande hachée, mais dans laquelle on y incorpore des amandes et des oeufs crus légèrement battus et pas cuits, et le cigare ne se fait pas avec une pâte brisée mais une feuille de diouls que nos mères et grands mères préparaient sur un plat bombé en cuivre étamé, et qui n’a aucun légumes en garniture, seulement les viandes, et le cigare que l’on trempe dans la sauce.
Je me souviens encore du bruit du pilon dans le mortier en cuivre pour piler les amandes mondées et légèrement torréfiées, je dis bien légèrement, à peine rosée, là aussi ma mère et mes tantes ne laissaient à personne le soin de torréfier les amandes, bien sur elles nous ont passé le flambeau et nous avons des outils plus pratiques mis à notre disposition, mais à l’époque le mixeur ou le cutter n’existaient pas. La viande qui accompagne Mfechech est de la viande d’agneau et sa préparation se fait la veille, pour que les arômes se développent mieux et le lendemain on retire la viande et il faut remettre la sauce à réduire.
Ma tante par alliance Lalla Aïcha Zedek née Hafiz qui a écrit le livre “recette de cuisine du Vieil Alger” Hélas introuvable maintenant, décrit bien ce plat, et que je n’ai retrouvé nulle part ailleurs même dans le traité Culinaire. Appelé aussi le plat de sbah l’ ãarossa – le plat du lendemain de la mariée.
Maintenant on passe à la recette, je rappelle que c’est la recette de ma famille telle qu’elle me l’a été transmise et non prise d’un livre.
Ingrédients
- Ingrédients de la viande en sauce
- 1 kg de viande d’ agneau ( épaule ou gigot)
- 1 oignon
- 2 cuillères à soupe d’huile neutre
- 1 cuillère à soupe de smen ou ghee
- 1 cuillère à café de cannelle en poudre
- 1/2 cuillère à café de poivre noir moulu
- 1 c à café de sel
- 1 bonne poignée de pois chiches trempés
- Ingrédients pour les cigares
- 300 gr de viande hachée de boeuf ou de mouton
- 100 gr d’amande torréfiées et moulues moyennement
- 1 oeuf entier battu en omelette
- sel
- Poivre noir 1/2 c à café
- 1 c à café de cannelle
- 1 gros oignon ciselé
- 1 cuillère à soupe de beurre ou de smen
- 6 feuilles de diouls ou feuilles de bricks coupées en 2
- huile neutre (huile de tournesol) pour la friture
Méthode de préparation
- La veille préparer la viande en sauce (ou le matin pour le soir)
- dans une cocotte minute mettre l’huile à chauffer avec le smen
- ajouter l’oignon coupé finement et faire suer l’oignon
- Poser les morceaux d’agneau dans le fond et ajouter les épices
- Mouiller avec 1 verre d’eau et faire revenir en remuant pendant quelques minutes
- Ajouter les pois chiches, bien remuer
- Couvrir d’eau à hauteur et cuire sur feux moyen 35 à 40 mn
- Quand les pois chiches et la viande sont cuits laisser dans la cocotte et réserver une nuit pour que la viande s’imprègne des odeurs et confise
- Le lendemain
- Remettre la sauce sur le feux pour la faire réduire, mais ôter la viande
- Préparer les cigares
- Dans un faitout mettre le beurre à fondre et ajouter les oignons ciselés
- Faire suer les oignons jusqu’ à ce qu”ils deviennent translucides
- ajouter la viande hachée, le sel, le poivre, la cannelle en poudre et bien mélanger
- Couvrir à moitié avec de l’eau et cuire 25 mn à feux moyen
- Laisser la sauce s’évaporer et que la viande soit bien rôtie
- Refroidir dans un récipient la viande doit être froide pour pouvoir être manipulée et ne pas déchirer les feuilles de bricks quand on devra les rouler en cigare
- Torréfier les amandes elles doivent être à peine rosée
- Mixer les amandes moyennes mais pas trop grosses et pas en poudre fine, il faut de la mâche
- Quand la viande hachée à bien refroidit, mélanger les amandes avec la viande hachée, rectifier l’assaisonnement
- Ajouter un oeuf battu en omelette pour lier le tout
- façonner des boudins et poser sur une 1/2 feuille de bricks ou feuille de dioul
- Vous pouvez coller la partie roulée qui reste apparente avec un peu de farine mélangée avec de l’eau qui servira de colle et évitera au cigare de s’ouvrir à la cuisson comme sur les photos
- Plonger les cigares dans une huile chaude (feux moyen)
- Retirer quand les cigares sont bien dorés et déposer sur un papier absorbant type sopalin pour retirer l’excédent de gras
- Servir dans une assiette creuse en posant la sauce et les pois chiches puis un morceau d’agneau et ensuite les cigares tout autour
- Les invités tremperont les cigares dans la sauce chaude.
- mettre huile beurre viande oignons epices
- couvrir a hauteur et cuire
- viande à cigare avec oignons epices et beurre
- couvrir avec un peu d’eau
- réduire jusqu’à plus d’eau
- ajouter les amandes torréfiées et la cannelle sur la viande rôtie
- ajouter l’oeuf battu
- bien mélanger la farce
méthode de pliage des cigares
- couper la feuille de brick en 2
- mettre un boudin de viande
- replier la 1 ère partie
- rabattre l’autre partie sur le boudin de viande
- commencer à rouler en serrant
- colle de farine et d’eau
- apliquer un peu de colle sur la partie restante
- rouler jusqu’au bout
- frire dans l’huile chaude






5 commentaires
Salem alikum Chef,
Je tenais à vous féliciter pour tout ce formidable travail ma cha Allah !! Ce sont des recherches titanesques que vous avez entrepris pour mon plus grand plaisir, vos articles me rappellent mon enfance en Algérie, d’autres m’ont fait rire comme la recette du makrout louz…. je me revois prendre le café avec ma mère, ma tante et ma grand mère fel hawch attablées à une meyda après salate el asr…..que de bons souvenirs ! En tout cas, merci pour ces explications historiques, je n’ai lu ça nulle part ailleurs…. un vrai délice autant pour l’esprit que pour les papilles 😉
Bonjour Fatiha, je suis ravie de vous avoir replonger en enfance, et oui ce sont beaucoup d’années de recherches et de lecture pour informer les lecteurs et lectrices, merci pour votre visite
[…] Mfechech momo fi ahdjeur’mo […]
Bonjour chef .
Un article si bien rédigé , la recette si bien detaillee machallah , un plat que je ne connaissais pas .
A tester inchallah .merci
Bonjour Louisa, merci pour ta visite et ravie de t’avoir fait découvrir un de nos anciens plats du terroir, bonne journée.